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Les marques en RTT : Responsabilité, Traçabilité, Transparence – 5/7

Dans les précédents épisodes, Lynx partners abordait la demande croissante des consommateurs autour du Bien-Manger et du Bien-Consommer et la place de tiers de confiance que s’octroient aujourd’hui les applications mobiles à l’instar de Yuka, malgré leurs limites. Désintermédiées par ces applications, les marques sont pourtant garantes de la qualité de la production, de la traçabilité de leurs produits, de la transparence des informations. Faire la preuve et communiquer sur leurs engagements sociétaux implique de reprendre leur place comme détenteur et distributeur de data, accélérer leur transformation et de redonner confiance aux consommateurs.

#BienConsommer #ConsommationAugmentée

Juge et partie ?

77% des français disent privilégier des enseignes faisant vœux de transparence (source : Syntec numérique 2018) mais seulement un quart estime que les entreprises sont honnêtes sur leur communication (Etude Greenflex). Le besoin de responsabilité et de transparence est indéniable. Mais quelle est la crédibilité, d’une marque commerciale à informer sur ce qu’elle produit ? Comment distinguer l’information de la communication ?

Lorsque les marques s’essaient à l’éducation et à l’information, même en partenariat avec des syndicats professionnels ou des tiers certificateurs, on les accuse, parfois à raison, de vouloir tirer leur épingle du jeu. Certaines marques comme Fleury Michon ont pris le contrepied de cette défiance avec l’activation « Venez Vérifier » invitant les consommateurs à se rendre sur les lieux de pêche et de production. AgroMousquetaires  a une démarche d’ouverture similaire et invite le grand public à découvrir ses usines et ses fermes

77%

des français disent privilégier des
enseignes faisant vœux de transparence

La défiance vis-à-vis des marques est d’autant plus grande que les media se sont engouffrés sur ces sujets polémiques et récurrents qui opposent capitalisme et transparence. Cash Investigation en est devenue l’étendard, ouvrant des débats légitimes mais souvent traités de manière anglée qui favorise le bashing. Cela donne du grain à moudre au grand public et le conforte dans l’impression qu’il a tout compris du sujet alors que l’information reste simplifiée et partielle. L’avis des scientifiques et autres experts est également de moins en moins écouté et souvent associé à du lobbying, notamment sur les cosmétiques. La qualité des labels, trop nombreux pour le grand public, est aussi challengée. Dans ce contexte, les applications mobiles, à l’instar de Yuka, ont bénéficié d’un terreau favorable pour s’installer massivement avec un argument choc : leur neutralité.

Les nouvelles obligations RTT : Responsabilité, Traçabilité, Transparence

Les thématiques du développement durable et du bien consommer se généralisent dans les communications mass media en France, notamment dans l’Alimentation et la Distribution. Ces campagnes répondent à une attente de sens de la part des consommateurs, dans leur quotidien mais aussi dans ce qu’ils consomment :

  • 69% des consommateurs veulent être actifs aux cotés des entreprises (source : Utopies)
  • 87% des français veulent des informations de traçabilité (dont l’origine) des produits qu’ils consomment (Source : BVA observatoire 2018)
  • Pour 9 Français sur 10, être mieux informé sur les produits alimentaires permet de consommer des produits de meilleure qualité (étude OpinionWay /Alkemics)

Responsabilité : les marques ont compris qu’elles devaient porter des valeurs et s’engager de manière crédible pour séduire les consommateurs citoyens. Carrefour,par exemple, a choisi de se positionner récemment comme une « entreprise à mission » lorsdont la raison d’être suivante, figurera en préambule des statuts de la société : « Notre mission est de proposer à nos clients des services, des produits et une alimentation de qualité et accessibles à tous à travers l’ensemble des canaux de distribution.

Traçabilité : Donner accès aux informations qui intéressent le consommateur à tout niveau de la chaine de production est la responsabilité des marques. accessibilité, sécurité, variabilité, mise à jour, enrichissement, distribution). Le scan-produit a partiellement répondu aux attentes et promet d’aller encore au-delà demain en traçant toute la chaîne produit. Tout l’enjeu est de trouver les moyens de communiquer les informations simplement à partir des emballages et des produits, de manière plus ou moins granulaire selon le produit, l’intérêt de chaque client, le canal de contact. Cette traçabilité augmentée [Lien vers article précédent] permettra aussi un retrait/rappel plus réactif sur les produits en cas de problème sanitaire suspecté ou avéré : en amont dans la chaîne logistique, en magasin au moment du passage en caisse, en aval au domicile du consommateur. Un moyen digital facile, utile, rassurant que les marques pourraient – devraient – exploiter plus.

Les consommateurs donnent de l’importance à l’information produits et à la maitrise de cette information par les industriels

Transparence : Enfin, le consommateur attend des marques qu’elles soient capables de s’adresser à lui avec honnêteté. La marque de vêtements Everlane a bâti son succès sur la transparence absolue. Elle détaille son business model, communique sur sa marge et partage des images de ses usines en Chine. Savoir reconnaître et expliquer que le 100 % (sans sucre ajouté, bio, made in France, recyclable, …) n’est pas toujours possible tout de suite est plus efficace que le mensonge que le consommateur identifiera tôt (la plupart du temps) ou tard.

L’engagement positif est un facteur de préférence chez les consommateurs. Les grands gagnants de l’année 2018 sur le marché des PGC ne sont pas les plus grands groupes. 52% de la croissance a été assurée par les PME (<50 M€ de CA) portées par le Local, le végétal et le bio.

Dans le secteur textile, Veja s’est illustrée ces dernières semaines en dénonçant une tentative de contrefaçon de Primark sur les réseaux sociaux. Menace transformée en opportunité de rappeler à son audience ses valeurs, ses responsabilités, son rôle et la traçabilité produit !

« Primark ne devrait pas copier le style de nos chaussures, ils devraient copier notre façon de les fabriquer. Avec du coton biologique, du plastique recyclé, des tissus plus écologiques, dans des usines où les ouvriers sont bien payés et travaillent dans des conditions de sécurité. Nous leur expliquerons tout devant le tribunal. » Sébastien Klopp co-fondateur de Veja

Des opportunités de valeur ajoutée pour les marques

Les achats, notamment sur les PGC, sont drivés par par 3 motivations difficilement conciliables : le plaisir, le bien manger, l’accessibilité. Lorsqu’il mange un burger, le consommateur veut connaître l’origine de la viande et se faire plaisir sans culpabiliser. Il n’a jamais fait autant attention, n’a jamais autant voulu tout savoir et, en parallèle, les grandes enseignes de restauration rapide ne se sont jamais aussi bien portées. Un Directeur RSE d’une grande enseigne expliquait dernièrement que la suppression des tomates et courgettes bio des linéaires en hiver avait généré des plaintes de consommateurs malgré la légitimé écologique de la démarche. Le consommateur citoyen est donc au pire schizophrène, au mieux, conscient de ses contradictions et de ce qu’il attend des marques :

  • Pédagogie : les sujets sont aujourd’hui volontairement simplifiés pour favoriser la compréhension par tous. Les marques doivent être pédagogues et ne pas chercher à cacher leurs imperfections
  • Cohérence : des valeurs en phase avec la marque et son ADN (c’est plus naturel pour certaines marques que pour d’autres : Ben&Jerry’s, Veja, Patagonia, …)
  • Des actes : le storytelling publicitaire ne suffit plus ; tout commence par l’interne (la marque employeur) et se poursuit par des renoncements et des actes

Aujourd’hui, les différents acteurs (industriels, distributeurs, labels, applications, …) s’observent, s’organisent et commencent à coopérer. De grands noms de l’industrie agro-alimentaire rencontrent Yuka et les applications les plus puissantes, challengent leurs sources et leurs algorithmes. Il est clé pour les grandes marques de reprendre la main dès à présent sur la certification et la diffusion de l’information sur leurs propres produits (ingrédients, informations nutritionnelles, origine, …)

Le digital est une opportunité pour communiquer et interagir avec ses consommateurs au quotidien, de manière personnalisée et adaptée à leur consommation, à leurs goûts, à leur santé. Transformer la relation au consommateur, investir dans la data produits et clients, produire du contenu pour expliquer et recréer ce lien de confiance a certes un coût mais sera profitable à long terme. Les consommateurs d’aujourd’hui et de demain sont prêts à renoncer aux marques qui ne joueront pas le jeu du RTT (Responsabilité, Traçabilité, Transparence) pour se tourner vers celles qui sauront leur parler.

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