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2020, l’année de l’hyper-connexion et d’une nouvelle conscience numérique I De l’hyper à la Smart-connexion

A l’heure de l’e-commerce et du télétravail, le numérique est omniprésent dans les vies de chacun. Connexion et plateformes digitales sont devenues indispensables, personnellement et professionnellement, au risque de voir croître progressivement lassitude, méfiance, critiques, voire saturation vis-à-vis des écrans et des sollicitations digitales, notamment commerciales. Un nouveau défi se présente donc pour les marketers et retailers : trouver le bon équilibre pour poursuivre sa croissance digitale sans que ses clients ne saturent de la connexion. Entre hyper-connexion et sobriété numérique, nous vous proposons de réfléchir à la juste place du digital dans la vie des consommateurs de sorte qu’elle reste plaisante, rassurante, non-envahissante, afin qu’ils continuent à avoir envie de consommer en ligne et bientôt, enfin, en magasins !

2020 est sans nul doute l’année de l’accélération digitale, en ayant rebattu les cartes des modes de travail, de déplacement et de consommation. Des usages en marche forcée dont certains pourraient être pérennisés pour inventer notre monde de demain. Dans le secteur de la grande distribution, 40% des habitudes prises par les consommateurs pendant le confinement avec le drive, devraient ainsi perdurer, ce qui représente 3 ans d’accélération digitale gagnés ! Les entreprises qui n’avaient pas encore suffisamment investi pour un modèle digital élaboré reconnaissent que, durant la crise, leurs e-services digitaux ont explosé, avec une croissance exponentielle de 40%.

Un temps de connexion inédit

Ces nouveaux usages sont naturellement liés à une hausse sans précédent du temps de connexion. Jamais les individus n’ont en effet été aussi connectés que depuis un an ! Avec 6h54 en moyenne passées par jour en ligne fin 2020, le temps passé sur internet dans le monde a augmenté de 4% par rapport à 2019. Le nombre d’internautes n’a également cessé d’augmenter, pour s’établir à 4,66 milliards d’internautes en janvier 2021, soit plus de la moitié de la population mondiale (+7,3% vs Janvier 2020). Les écrans et les objets connectés représentent un temps conséquent dans nos vies, parfois hégémoniques pour ceux qui télé-travaillent. Salvatrice pour échanger, se divertir, travailler, vendre et acheter, cette connexion exacerbée devient aussi une source de stress et de fatigue. Plus inquiétant encore pour les marketers digitaux que nous sommes, cette hyper-connexion finit par avoir des répercussions sur le rapport au digital des individus et, notamment des consommateurs. Au risque de créer une saturation qui ne servirait personne.

Des cookies à la limite de l’indigestion

Chaque fois qu’un internaute utilise un écran, celui-ci devient une opportunité publicitaire, au plus grand bonheur des annonceurs. Dans ce contexte d’hyper-connexion, la publicité numérique a explosé et capte pour la première fois en 2020 plus de la moitié des recettes publicitaires françaises (55,2%). La collecte des données des internautes n’est pas en reste : plus un site peut collecter d’informations sur ses internautes, mieux il se porte. C’est ainsi que 95% des 100 sites les plus consultés de France, déposent les cookies Analytics sans consentement explicite des internautes à leur arrivée.

Mais voilà, entre cookies, géolocalisation automatique, formulaires personnels incessants, les internautes se lassent de plus en plus de cette « invasion » dans leur sphère privée et disent ne plus faire confiance aux sites lorsqu’ils naviguent sur internet : 1/3 des Français reconnaît renseigner des informations erronées dans les formulaires d’inscriptions aux plateformes internet. Une mauvaise nouvelle pour les entreprises qui font du profiling leur métier et qui se voient prendre à leur propre jeu. Certes, depuis le 1er avril 2021, la loi limite la collecte de cookies : le visiteur d’un site internet, qu’il navigue sur un site de média ou un site marchand, doit accepter explicitement que ses données ainsi que son suivi de navigation soient collectés. Une action réglementaire vécue comme une contrainte par nombre de directions marketing mais qui, au long cours, œuvre pour une liberté et une confiance numérique durable.

Des réactions anti-digitales

Conscients de la place croissante que prend le digital dans leur vie, les internautes témoignent de premières réactions anti-digitales. Le consommateur diminue les sollicitations en classant de plus en plus d’e-mails dans la catégorie « spam », et en installant des Adblockers. 44% des internautes utilisent des bloqueurs de publicité et 53% ont déjà effacé les cookies de leur navigateur dans le mois passé.

Plus surprenant encore, les développeurs des applications eux-mêmes dénoncent les pratiques addictives employées par les GAFAM pour rendre les utilisateurs accrocs, ce qu’on peut voir par exemple à travers les témoignages de Tim Kendall (Facebook, Pinterest) ou encore Tristan Harris (Youtube) dans le documentaire « Derrière nos écrans de fumée », disponible sur Netflix.

Cependant, si les internautes deviennent plus vigilants quant à l’utilisation qu’ils font des écrans, il leur est difficile de s’en détacher véritablement. Oui, le consommateur surveille son temps d’écran, mais… sur son téléphone ! 13% des internautes français de 16 à 64 ans traquent leurs temps d’écrans grâce à une application sur leur smartphone, ce qui témoigne bien de notre addiction et de la difficulté à couper le cordon avec nos accessoires préférés.

Vers une sobriété numérique ?

Cette saturation surfe enfin aussi sur la montée des engagements environnementaux des Français. Il est vrai que l’on ne peut pas ignorer que le numérique a généré 4% des émissions de gaz à effet de serre en 2019, et 8% sont estimés pour 2025. Et que l’envoi d’un e-mail équivaut en énergie à une ampoule allumée pendant une heure… Afin que l’utilisation du numérique soit plus consciente et vertueuse, il faut dès maintenant encadrer cette sobriété numérique. C’est en repensant dès maintenant les modèles, en proposant aux internautes des expériences transparentes, conscientes, alternatives, ouvertes que nous lutterons contre les « digital-detox » intempestives et autres désabonnements « ras-le-bol » qui au final desservent autant les individus que l’économie.

Il est bien normal que cette tendance à l’hyper-connexion et la croissance de tous les usages en ligne, qu’ils soient marchants ou non, aillent de pair avec la montée d’un esprit critique et d’un vent libertaire vis-vis du numérique. Ce sont aux marketers et aux retailers d’intégrer cette nouvelle donne dans leurs stratégies digitales afin que leurs clients ne saturent ni de la connexion ni de la relation et gardent intacte l’envie de e-consommer ! C’est donc le moment de trouver le juste équilibre digital et data, ce que nous avons appelé, dans notre prochain article : la Smart-Connexion.

Stéphanie Çabale, directrice associée, Gwenaëlle Lavaud et Aline Frapech, consultantes

Illustrations : Bill Jelen, Kelly Sikkema

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