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Changer pour générer du trafic et de la préférence d’enseigne en période d’inflation

La situation économique difficile et durable que nous traversons depuis des mois bouleverse nos vies, nos modes de consommation et par ricochet les stratégies marketing, d’acquisition et de trafic de toutes les marques. Comment continuer à attirer des clients dans les espaces de vente, au-delà des Black Friday et/ou Cyber Monday ?! Comment convaincre des clients aux budgets serrés, contraints à l’infidélité pour dénicher chaque meilleure affaire ? Comment mieux différencier ses profils clients dont les attentes et les écarts comportementaux se creusent ? Comment créer des parcours-réflexes adaptés à chacun et devenir un compagnon d’achats sur la durée ? L’heure est plus que jamais à la remise en question de nos habitudes marketing et à l’innovation simple et efficace.

La guerre en Ukraine et la pandémie mondiale, qui semble se raviver hélas ces jours-ci, génèrent pour tous – producteurs, distributeurs, consommateurs – un contexte économique inquiétant : l’inflation annuelle de la zone euro est estimée à 10,7% en octobre 2022 (source Eurostat 31.10.2022) et la consommation des ménages affiche encore une baisse de -2,8% en volume sur le mois d’octobre. Cette situation modifie sans surprise, structurellement et durablement parions-le, les comportements de tous les consommateurs et avec eux les stratégies marketing des entreprises.

Pour compenser la guerre des coûts et la bataille des “prix les moins hauts “, la diminution des stocks voire la pénurie de produits en magasins, la digitalisation a apporté de premières solutions : le e-commerce et la livraison à domicile connaissent depuis 2020 un développement à 2 chiffres. Il faut insister sans nul doute et optimiser encore les parcours croisés entre site et application e-commerce, magasins physiques voire marketplaces. Il faut aussi proposer de nouveaux leviers client attractifs à l’instant et sur la durée.

Ne plus différencier Acquisition et Fidélisation 

Créatifs, les marketeurs ont mis toute leur énergie à réagir par de nouveaux dispositifs d’acquisition de trafic, très tournés sur la promotion immédiate, au détriment de leur marge, et sur des dispositifs de masse : nouveaux formats publicitaires et promotionnels, nouveaux réseaux sociaux comme Tik-Tok ou Twitch, partenariats avec des marketplaces de bonnes affaires, …  Avec un seul et même message pour tout le monde : « aujourd’hui c’est chez nous que c’est moins cher ». En difficulté financière, en manque de temps, et ainsi incités à la volatilité par les enseignes elles-mêmes, comment leur reprocher leurs infidélités ?!

Pourtant, si les marques savaient réellement se mettre « dans les chaussures et dans les portefeuilles de leurs clients », elles auraient compris que la plupart raisonnent en fait bien plus Budget que Prix… Concentrés sur des difficultés de début ou fin de mois, mois après mois, les consommateurs ne dissocient donc plus ni les dispositifs ni les moments d’acquisition ou de fidélisation : ce qu’ils veulent, c’est gagner à tout moment. Pourquoi donc les marques font-elles encore cette distinction d’un autre temps ? Car l’attachement à certaines enseignes et marques est plus fort que jamais, preuve que même opportunistes, ils savent rester fidèles aux expériences capables de les servir au mieux, dans l’instant, et au fil du temps.

Il est donc indispensable aujourd’hui pour les entreprises de « dé-verticaliser » leur approche de “Get & Keep”, c’est à dire leur stratégie, leurs moyens et leurs organisations, et de la travailler sur deux temporalités simultanées : le court et le moyen terme. Avec deux essentiels en tête : Avantager mieux et individualiser plus.

Réapprendre à avantager ses clients

1.
En combinant discount et avantages
dans un modèle de générosité global

 

La première conséquence, et opportunité, de cette fusion entre acquisition et fidélisation, c’est l’obligation qu’ont les marques et les enseignes aujourd’hui à repenser leur modèle de générosité pour en faire un modèle global, fondamentalement plus généreux donc plus convaincant ! Comment ? En combinant et en montrant la valeur qu’elles rétrocèdent à leurs clients quels que soient les dispositifs. Ainsi, cette générosité globale associe des dispositifs historiquement portés par des départements, des budgets et des équipes différentes :

  • La promotion, et toute autre forme de discount, aussi intouchable et contrainte par la régulation…

  • Une générosité individuelle, liée aux cartes et programmes de fidélité, qui varie selon l’engagement de chaque client (bons de réduction personnalisés, avantages selon ses usages, primes au téléchargement de l’application ou à la mise à jour de données utiles, …)

  • Une générosité plus communautaire, qui valorise les parrains, les joueurs, mais aussi les beta-testeurs, les ambassadeurs, et les donneurs d’avis, et s’attache à transformer un client satisfait en un “rabatteur” efficace et reconnu comme tel.

Cette générosité complète, profondément customer-centric, est une arme de conviction massive, à condition d’être visible, lisible et incrémentale.

Des marques l’ont déjà compris en n’envoyant pas seulement une fois par an le bilan de leur fidélité à leurs clients mais en affichant des bilans incrémentaux et des compteurs d’économies réalisées en temps réel au sein de leurs parcours d’achat et de leurs supports de relation client. C’est le cas de l’enseigne Intermarché avec le « Bilan ConsoMieux », visible sur chaque compte client, qui affiche par mois et par an les économies réalisées à la fois en remises immédiates et en avantages fidélité cumulés. En aidant les clients à gérer leur budget, un tel service travaille la préférence d’enseigne à la fois en longévité et en immédiateté. Combo gagnant.

Cette générosité d’enseigne qui mixe promotions, avantages fidélité et bonus communautaires est une arme de conviction massive, à condition d’être incrémentale et mise en visibilité.

2.
En sophistiquant ses opérations de trafic

 

La deuxième conséquence est que nous marketeurs devons apprendre à créer deux formes de trafic absolument complémentaires : le trafic d’impulsion et le trafic de préférence.

L’impulsion s’appuie sur le coup de cœur, l’immédiateté de la bonne affaire et la rareté. Le live shopping en est la nouvelle star, en Asie comme le fait l’enseigne chinoise TaoBao en direct tous les jours sur le réseau social Douyin – le TikTok chinois – mais aussi en France avec le “télé-achat 2.0″ sur le site et l’application Carrefour. Jouer avec le (manque de) temps est une mécanique qui continue à faire ses preuves : l’enseigne Casino est une adepte des happy hours promotionnels en heures creuses ; Uber Eats offre la livraison pendant des offres flash de quelques minutes et le compte à rebours se lance à la connexion sur l’application, comme sur TooGoodToGo pour laquelle des promotions instantanées dépendent la fraicheur des produits et l’anti-gaspi, c’est-à-dire le modèle.

Le trafic de préférence va quant à lui valoriser l’habitude ou le réflexe pour avantager ses adeptes dans la durée. Et c’est lui qui suscite en ce moment le plus d’innovations. De manière très maligne, certaines enseignes vont ainsi institutionnaliser des jours fixes de promotions thématiques : Super U a ainsi fait du Jeudi Plus son jour -34% sur des produits qui changent chaque semaine ; Hao à Singapour, avantage les Seniors qui viennent faire leurs courses les lundis et les jeudis et fait de ces jours de moindre affluence des rendez-vous gagnants ; chez Waitrose en Angleterre le vendredi est le jour du poisson et le samedi celui de la viande avec des réductions chaque semaine ou encore chez Leclerc, la 1ère semaine de chaque mois est le rendez-vous -10% sur tout le rayon frais.

La nouvelle tendance des abonnements en est aussi une preuve évidente. Et l’on voit fleurir nombre d’abonnements pour de la location et de l’usage temporaire et longue durée sur le modèle des industries du divertissement plutôt que de l’achat, sur des biens comme les vêtements, les jouets, le matériel de sport ou de bricolage, la mobilité,… . Et même des abonnements contre des promotions supplémentaires, soit payer pour être toujours sûr de payer moins cher !

Enfin, on constate aussi de plus en plus de primes données à l’engagement des clients : le consommateur peut gagner jusqu’à 30€ en bons d’achat s’il partage son avis sur son magasin Lidl,; avec Joko, l’app de bons plans, il gagne 20 points par réseau social auquel il s’abonne et 1000 points pour l’installation de l’extension web ; s’il télécharge l’application Uniqlo, il reçoit un bon cadeau de 5€ et 5€ de plus en s’abonnant à la newsletter.

Des récompenses incitatives à la préférence, toutes « canal-agnostiques », qui placent le e-commerce comme partie intégrante du réseau de points de vente, une autre évolution pas vraiment encore bien répercutée non plus au sein des organisations…

Savoir jongler avec deux formes de trafic spécifiques et complémentaires : le trafic d’impulsion et le trafic de préférence.

Individualiser l’ensemble de sa relation client

Chez Lynx partners, nous utilisons plus volontiers le terme “individualiser” à celui de personnaliser.  Parce que dans “individualiser”, il y a deux notions qui nous sont chères : celle de mieux toucher l’individu et celle d’humaniser la relation entre marques et clients.

L’efficacité de la personnalisation se constate bien sûr aussi sur les dispositifs d’avantages ! Et ce qui nous a le plus marqué ces derniers temps, c’est l’ingéniosité des nouvelles solutions de gamification basée sur l’IA et la prédiction de préférences de marques, d’achat, d’usage ou de fréquence. Ce sont elles qui sont derrière “Les Défis Waooh“, “Instants gagnants” et autres “Parcours gagnants” dont vous pouvez bénéficier dès lors que vous possédez la carte de fidélité de l’enseigne en question. Nous les avons repérées, testées et analysées chez Leclerc, Carrefour, Auchan, Intermarché, Picard en France, ou encore chez Continente au Portugal et RiteAid aux Etats-Unis. Les dispositifs sont faciles, ludiques, respectueux des budgets des clients et affichent des résultats impressionnants.

Mais quand on parle “individualisation”, on parle bien entendu aussi de ciblages, plus fins, plus justes, plus pertinents sur 3 axes complémentaires :

  • Enrichir les segmentations client en tenant compte du potentiel de valeur des acheteurs, des nouvelles contraintes du StopPub, de la diversité des moyens de contacts digitaux

  • Modulariser des kits MarCom par segments Points de Vente plus précis croisant les particularités de leur zone de chalandise, les caractéristiques de leur concurrence, le potentiel valeur de clientèle ou son niveau de digitalisation, …

  • Déterminer enfin plus adroitement les moments réceptifs et pertinents de ciblage, avec des solutions de contextualisation et de géotargeting plus poussées

Notre expérience chez Lynx partners est de savoir innover et accélérer dans des contextes en évolution constante. Les situations délicates sont les moments où l’attentisme frileux et le recyclage de vieilles recettes sont contre-productifs. C’est maintenant qu’il faut oser bousculer ses schémas, ses habitudes, ses organisations et tenter de nouvelles initiatives. Des retailers s’y mettent et les clients les récompensent. Qu’attendez-vous ?

Illustrations : Heidi Fin via Unsplash.com

Stéphanie Çabale, Directrice associée

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